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Photographier l'incertitude

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Qu’est-ce qui nous plait dans une photo ? Qu’est-ce qui retient notre attention ?  S'agit-il de son sujet ? De sa capacité à nous informer, à nous émouvoir ? De ses qualités plastiques ? Un peu de tout cela probablement. Mais ces caractéristiques ne sont pas propres à la photographie. Un dessin, une peinture, un film, une vidéo possèdent également ce potentiel… En quoi consiste, alors, la spécificité du medium photographique ? C’est à cette question que Roland Barthes s’est attaché à répondre dans son essai La chambre claire . Pour lui, ce qui rend unique et captivante une photo, c’est ce qu’il appelle le punctum . Le punctum est un élément qui détonne au milieu de l'image, qui se détache de l'impression d'ensemble et l'arrache à l'ennui d'un document platement informatif. Cela peut être un objet incongru, l'attitude décalée d'un personnage, la complexité inattendue d'une situation...    Koen Wessing, "Nicaragua", 1979.   Roland B

Trois nuances de blanc

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  Dîners des Vilains Bonshommes. Cercle des poètes zutiques. Club des Hydropathes. Fumistes. Hirsutes. Incohérents… À Paris, dans les années 1870-1880, se développe une galaxie de "mouvements artistiques" plus ou moins éphémères qui placent l’humour et l’irrévérence au centre de leur activité.  Composés principalement d’écrivains et de dessinateurs, leurs auteurs revendiquent "les méthodes d’exécution les plus imprévues pour faire enfanter des œuvres follement hybrides à la peinture et à la sculpture ahuries". Et déclarent "œuvre d’art incohérent" tout dessin d’une personne ne sachant pas dessiner. Cette liberté par rapport aux conventions artistiques leur permet d’extraordinaires intuitions qui anticipent nombre des inventions attribuées aux avant-gardes du vingtième siècle : collages surréalistes, théâtre de l’absurde, installations, happenings, musique silencieuse, peintures monochromes. C’est ainsi qu’en 1883, à la suite de son ami Paul Bilhaud qui

De quoi l'art est-il le nom ?

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    L'appropriation du monde   Dans la deuxième moitié du dix-neuvième siècle, l’art occidental s’ouvre largement sur le monde. Manet, Monet, Van Gogh, Degas, parmi bien d’autres peintres de la période impressionniste, découvrent et collectionnent les estampes japonaises. Ils en tirent des leçons qu’ils mettent en pratique dans leurs peintures. Le rejet de la perspective cavalière, la frontalité et les décadrages traduisent cette influence. Édouard Manet, "Portrait d'Émile Zola", 1868. Claude Monet, "La barque", 1887. Vincent van Gogh, "La moisson en Provence", 1888.   Gauguin, de son côté, s’embarque pour la Polynésie et se réinvente au contact de la culture locale, la mélangeant allègrement avec des poses égyptiennes. Paul Gauguin, "Ta Matete", 1892. Mais c’est avec les avant-gardes du début du vingtième siècle que l’influence des formes d’expression propres aux sociétés lointaines devient omniprésente dans l’art occidental. La sculptu